▬ Il naît des amours de deux sorciers issus de familles sorcières également. Hélas, le père n’assumant pas le rôle qui devait lui incomber, il se barre comme un malpropre, trois mois avant la naissance de Thomas. Il laissera ainsi une fiancé éplorée et pas loin d’être enceinte jusqu’aux yeux.
▬ Ca n’empêche pas Dominique de se relever. Toujours plus forte, toujours plus rayonnante. Un soleil bien rond. Elle fera même tomber sous la charme de sa gravité un jeune homme qui, en réalité, l’aimait depuis bien plus longtemps qu’elle avait été en couple avec l’autre connard précédemment cité. Après quelques mois, les sentiments réciproques s’installent. Surtout lorsque Grégoire se propose pour l’aider avec le bébé venant de naître. Rien ne l’y oblige. Il le fait quand même. Les barrières tombent aussi vite qu’elles avaient été dressées.
▬ Le hic ? C’est un moldu. Sorcier, certes. Mais né-moldu tout de même. La famille de Dominique n’apprécie que très moyennement. Elle les envoie se faire foutre. Après tout, ils n’avaient jamais été d’un grand soutien tout court sitôt qu’on s’écartait des plans fait à l’avance. Hors, c’était la passion première de Domi. Bon, elle a tout de même pleuré d’être reniée. C’était sa famille, quand même.
▬ Elle a composé avec, pourtant. Et comme une cheffe. Thomas grandit entouré de tout ce qu’il aime. De ceux qui l’aime, aussi. Et une petite sœur se rajoute au tableau.
▬ Le bonheur aurait pu perdurer infiniment. Mais il y a un autre hic. Grégoire s’est fait mordre quand il était enfant. Par un loup-garou. C’en est un aussi, donc. Mais jusque-là, tout avait été fait pour contenir la bête, pour la maintenir à l’écart de la famille. Sauf ce fameux soir. Thomas dormait lorsqu’il a entendu des cris dans le salon. Il s’est relevé, petit garçon d’à peine onze ans, pour aller voir ce qu’il se passait en bas. Curiosité.
▬ Il a vu le corps de celui qui l’avait élevé comme son père se transformer, se tordre, se crisper. Il a entendu les hurlements s’intensifier. Il a vu la fourrure noire le recouvrir. Et surtout. Surtout, il a entendu sa mère crier pour qu’il s’enfuie.
▬ Mais Thomas n’en a rien fait. L’animal s’est jeté sur sa tendre mère et déchiqueta ses bras, son buste dans une rage incontrôlée. Il ne se souvient pas bien de ce qu’il s’est passé à ce moment-là, Thomas, mais le loup s’était retourné vers lui, lorsqu’il lui a crié de laisser sa mère en paix. Il ne doit son salut qu’à un sort raté, qu’il a voulu lancer avec la baguette de sa mère. Mais le sortilège, prononcé au hasard, s’est révélé avoir plus d’effet qu’un boomerang et lui revint en pleine figure, provoquant une lumière éblouissante par la même occasion. C’est ce qui mit le loup-garou en fuite. Les pompiers ne purent que constater les dégâts.
▬ Grégoire avait été abattu. C’était tout ce qu’on leur avait dit. Il avait été neutralisé. Dominique était désormais elle aussi contaminée et avait perdu les deux avant-bras, en plus d’un œil. Une large trace de griffure tatoue désormais son buste, sa poitrine.  A tout jamais. Elle ne pourra pas oublier. On pourrait la croire prête à sombrer, encore.
▬ Mais non. Elle a rassemblé tout son courage et, dès qu’elle put rentrer chez elle, commença des aménagements pour lui faciliter la vie. Thomas, lui, devra vire avec une chevelure devenue grise. Marqué à tout jamais par cette nuit. Personne ne sait comment lui rendre ses cheveux comme avant. Il reste presque totalement muet pendant un mois, choqué par l’expérience.
▬ Lorsqu’il est temps pour Thomas de rejoindre une école de magie, c’est forcément Beauxbâtons qui a sa préférence. Il embarque donc pour un voyage de plusieurs kilomètres pour rejoindre l’établissement. Il y débarque avec son français étrange, mélangé avec une pincée de québécois – puisque Grégoire, originaire de Montréal, lui avait toujours parlé ainsi. Au départ, tout se passe bien.
▬ Il tombe amoureux. Pour la première fois, il a l’impression d’être quelque chose pour quelqu’un. Ca l’aide à passer outre. Elle est si jolie, si rayonnante. Bien vite, elle devient sa confidente et plus encore. Lorsqu’elle l’embrasse, Thomas croit défaillir. Il a treize ans et il donnerait n’importe quoi pour que ce moment ne cesse jamais.
▬ Trahison. Après une idylle qui aura duré presque deux ans, elle le largue comme s’il n’avait jamais rien représenté pour elle. Pire encore, elle dévoile à tout le monde les secrets qu’il lui avait confiés, les lettres –un peu niaises, c’est vrai, mais il l’aimait ? – qu’il lui avait écrite, à l’encre de son âme. De son cœur. Elle le brise comme personne n’y était encore arrivé. Pourtant il distingue bien un sourire sur ses lèvres de miel. Comment a-t-elle pu ? Aujourd’hui encore, il n’a pas la réponse. Il avait quinze ans. Bientôt seize.
▬ Sa mère ne met pas longtemps à tout découvrir – elle n’avait jamais aimé cette fille. Lorsqu’elle récupère Thomas à l’aéroport, le premier jour des grandes vacances, c’est un jeune homme broyé qu’elle retrouve. Entre temps, elle avait déménagé à Montréal pour rester en contact avec la famille de Grégoire, ces derniers étant bien plus présents pour elle que son propre sang. Il n’y a pas de mot assez fort pour décrire l’amertume qui s’est glissé dans les bras de Dominique en voyant son petit garçon ainsi de retour. Grégoire aurait pu l’aider. Ils auraient pu parler. Entre hommes. Entre père et fils. Son absence ne se fait que plus incisive.
▬ Peu avant Août de cette même année, elle parle à Thomas de Freyas Eviges. Une école de magie plus petite et moins réputée que Beauxbâtons mais aussi, elle l’espère en tout cas, plus saine. L’une de ses amies y travaille régulièrement. Elle pourrait prendre Thomas en protégé pour l’intégrer à cette nouvelle structure. Il lui faudrait seulement apprendre le danois, mais cela ne devrait pas poser problème.
▬ Au départ, il refuse. Il ne veut même plus entendre parler de magie. Après trois semaines, Dominique craque et fini par lui secouer les puces façon Berserker – en le menaçant de l’ensevelir sous toutes les casseroles du quartier s’il ne bouge pas ses fesses. Argument convaincant. Les casseroles l’ont donc sorti de la dépression.
▬ Il démarre une nouvelle année à Freyas Evige et s’imprègne de cette culture neuve. Il ne connait pas bien le Grand Nord et prend plaisir à s’y plonger. En parallèle, il découvre une culture moldue très intéressante et s’y perd encore plus. Le Japon… Cela avait l’air très intéressant, il se jura d’aller visiter ce pays un jour. Après ses études. Lui qui n’avait jamais vécu ailleurs que dans une ville sorcière, il découvre des tas de choses jusque-là restée très lointaines. Il adore ça.
▬ Il enchaine les réussites, sauf en maniement de la baguette, qu’il n’apprécie guère. Lui préfère créer des armes magiques, comme son arc avec lequel il s’entraîne régulièrement. Les résultats sont maigres, mais il ne perd pas espoir. Il persévère. A côté de ça, c’est un élève irréprochable, bien que discret et réservé. Il est préfet et fier de l’être.
▬ Ses pérégrinations ici se passent plutôt bien. Il rencontre l’énergumène qu’est Ezra, la pauvre gosse qu’est Candide et pourtant, même s’il râle, leurs présences lui font du bien. Mais il ne l’admettra pas – il a sa fierté, oh !