caractère ici

Livø... Son camping, ses berges, ses champs, ses petites maisons... Son camping, ses berges... Ce fut une véritable libération pour Ayla de quitter sa petite île isolée du nord du Danemark pour rejoindre l'école de sorcellerie de Rømø, à ses 12 ans. Elle avait fini par en faire le tour au moins quelques centaines de fois, gambadant sur les plages et dans les prairies, par tous temps, à toute saison. Tantôt c'était avec sa mère qu'elle allait observer l'évolution de la forêt, elles allaient trouver les petits écureuils blessés ou transis de froid pour les réchauffer ou les remettre sur pattes d'un coup de baguette magique. Parfois, Femke, la mère d'Ayla, lui donnait un morceau de bois en lui faisant croire que c'était sa baguette et que c'était elle qui soignait les animaux, mais Ayla avait bien fini par comprendre qu'elle n'avait pas présenté d'aptitudes magiques exceptionnelles avant d'arriver à l'école, si ce n'étaient quelques éclats de verre lorsqu'elle était contrariée. D'autres fois, c'était avec son père qu'elle se rendait sur la plage, simplement pour regarder la mer et les bateaux. Ian ne faisait pas de magie, mais il avait de l'or entre les doigts lorsqu'il assemblait des sculptures uniques avec des morceaux de verre poli, de bois flotté ou de pierre lisse. Ayla en a toute une collection dans sa chambre.

Mais celui qui savait vraiment y faire, celui qui animait jour après jour la vie tranquille d’Ayla dans sa jeunesse, c’était John, un jeune anglais venu faire un voyage de quelques années au Danemark, pour récolter les fonds nécessaires pour financer ses futures études moldues en faisant du baby-sitting. John aussi était un sorcier, c’est pour cela que Femke et Ian lui faisaient confiance. Il avait le curieux projet d’étudier la technologie moldue, l’Internet et autres gadgets. Des études poussées qui nécessitaient quelques ressources financières qu’il comptait gagner simplement en prenant son temps. Il emmenait donc Ayla, jour après jour, vivre de folles aventures tout au bout du banc de sable à l’extrémité sud de l’île de Livø. Si ses parents l’avaient su, certainement qu’ils l’auraient renvoyé, ou au moins ils lui auraient passé un savon. Mais il ne résistait pas à voir la joie de la fillette lorsqu’elle courrait sur le sable, à des kilomètres de l’habitation la plus proche, la mer à perte de vue. Ils imaginaient des bateaux pirates, des krakens géants, des sirènes et des poissons multicolores. De temps à autres, John bâtissait un palais de sable en faisant jouer sa baquette, il créait un palace pour sa princesse. Durant toute sa jeunesse, Ayla avait été secrètement amoureuse de John, comme une gamine, et elle songe à présent avec plaisir à cette jeunesse naïve.

C’était John qui avait fait l’école à Ayla durant les dernières années avant son entrée à Freyas Evige. Au départ élève moyenne, d’une manière fulgurante elle avait accumulé quantité de connaissances, surtout autour de la linguistique et de la littérature. John aimait beaucoup lire et elle aussi. Ils lisaient ensemble et John lui avait présenté quelques-uns de ses livres en runes, de quoi donner l’eau à la bouche d’Ayla, qui s’extasiait déjà de pouvoir trouver des tonnes de livres en écriture runique à l’école. Peu à peu, elle développait une passion pour la lecture et le déchiffrage des runes. En fait, avec John, ils s’étaient imaginés pouvoir trouver d’anciens textes en runes et pouvoir découvrir des tas de secrets. Sans qu’elle ne veuille réellement l’avouer, Ayla poursuit toujours ce rêve, seule désormais, depuis le départ de John pour l’Angleterre.

Il était certain que l’arrivée à Freyas Evige constituait une véritable vague de nouveauté et un tourbillon d’angoisses pour Ayla. Elle qui avait toujours suivi des cours à distance, voir autant de jeunes gens de son âge l’avait plongée radicalement dans les méandres des relations sociales. Au départ timide et hésitante, elle avait bien fini par affirmer le caractère curieux, bienveillant et rêveur qu’elle avait eu dès son enfance. Finalement la présence de John avait été bénéfique pour elle, elle avait été endurcie par des années de vagabondage et avait gagné en sagesse, en force de caractère et en maturité auprès de ce garçon plus vieux qu’elle et plein de connaissance. Elle ne tarda pas à s’intégrer parfaitement, liant des relations peu nombreuses mais basée sur le respect, qu’elle considère désormais comme une valeur indispensable.

Avec les années, Ayla est devenue plus calme et plus réservée à nouveau, comme si être constamment en relation avec ses camarades lui demandait un effort important. En fait, la tranquillité et le grand air de Livø viennent à lui manquer, surtout lorsqu’elle n’a qu’une envie : s’installer avec un bon livre. Même à la bibliothèque, elle trouve les bruissements de pages, les éternuments et les pas feutrés beaucoup trop perturbateurs. Ayla est bien dans son dortoir, quand il n’y a personne, avec sa chatte, Princesse, sur les genoux, un bon livre et un chocolat chaud. Elle étudie ardument, sans cesse. Les runes sont toujours sa passion, c’est pour cela qu’elle a décidé de les enseigner à son tour. Son apprentissage en tant qu'assistante la ravit, elle s’en sort plutôt bien. L’autorité et la prise de parole semblent de plus en plus naturelles pour elle. Elle a hâte de pouvoir mener ses cours à sa manière, dans le calme et avec bienveillance.