Une voix qui tonne, colérique, pleine de reproche.
Ton cœur qui se serre dans ta poitrine, les larmes qui te montent aux yeux, ton corps qui se tend.
Tu ne sais pas pourquoi il hurle, pas pour le moment. Tu ignores ce que tu as encore fait pour le mettre dans cet état.

Les insultes volent, coupante, se coincent dans ta gorge dans une boule d’angoisse. De culpabilité.
Les mots de Rhys effleurent ton esprit aussi vite qu’ils en sortent. Il est adorable, mais il ne te connaît que par tes mots. Que par tes agissements envers lui même. Il ne sait pas à quel point tu peux gaffer parfois. Tu sais bien que s’il s’énerve c’est que tu as encore fait une erreur.

Idiote.

Un papier s’agite soudainement sous tes yeux et ton souffle se coupe. Comment- ? Est-ce qu’il est rentré dans ton dortoir ?

Un quart de seconde, c’est en colère que tu te sens. Jusqu'à ce que ses mots t’atteignent de nouveau et que tu ne baisses les yeux. Docile enfant.

Tu aurais dû lui en parler.
Tu aurais dû mieux les cacher.
Il faut que tu t’excuses.
Il faut que tu les récupère.
Tu ne peux pas le trahir comme ça.
Tu ne peux pas le perdre maintenant.

Ta bouche s’entrouvre alors que tu t'apprêtes à prendre la parole, mais c’est un hoquet de surprise, de peur, qui en sort au lieu des pathétiques excuses que tu avais prévues.
Parce que sa main vient de se lever, menaçante, et que tu ne peux pas empêcher ton mouvements de recul alors que tu sais, pertinemment, que ça ne fait que l’énerver encore plus.

Et il agrippe ton poignet. Et tu geins légèrement parce qu’il l’empoigne bien trop fort.

“ARRÊTE D’AGIR COMME SI J’ALLAIS TE FRAPPER. FAIS PAS COMME SI J’ÉTAIS LE CONNARD, ALORS QUE T’ES UNE PUTAIN DE GOSSE QUI SE PLACE EN VICTIME, ALORS QU’ELLE FAIT DES TRUCS DERRIÈRE MON DOS. C’EST QUI ÇA. ”

Ton souffle est erratique comme les battements de ton cœur. Non, il a raison, t’as fais une connerie tu dois assumer. Tu savais qu’il fallait en parler avant qu’il ne mette la main dessus…

“C’est. Tu sais, le principe des correspondants avec l’école dont je t’ai parlé … C’est un élève américain on, on discute un peu par lettres. ”

Tu pries. Tu pries pour qu’il ne soit pas tombé sur une lettre ou Rhys remet en question son comportement. Tu pries pour qu’il n’ait pas lu de compliments, qu’il n’ait pas vu qu’il veuille venir en Australie. Tu pries pour qu’il ne ressente pas votre attachement progressif.
Tu ne veux pas avoir à choisir. Pas cette fois.

“— J’en ai rien à battre que ce soit avec l’école. J’veux plus que tu lui parles. Clairement il cherche à t’éloigner de moi. J’ai bien vu son petit jeu, jouer les gentils, faire de moi le méchant ! Il te manipule, tu le vois même pas tu réfléchis pas ! C’est encore à moi de te protéger de tes propres relations !!
— Non ! ”

Ce n’est rien de plus qu’un murmure, désespéré, suppliant, à peine prononcé. Mais il a franchi tes lèvres assez audiblement pour arriver à ses oreilles et ta main libre rejoint aussitôt ta bouche, tes yeux écarquillés. T’aurais jamais dû dire, ça t’aurais jamais …

Ta tête tourne sous la violence de sa main et ton souffle se coupe. Tu ne prononces pas un mot, tu ne dis pas un mot mais les larmes que tu retenais coulent aussitôt sans que tu ne le réalise vraiment.
Sauf qu’avant même que tu n’aies le temps de réaliser, de réfléchir à ce qui vient de se produire, il s’effondre devant toi et fond en sanglots entrecoupés d’excuses.

“J’aurais pas du. Oh, Merlin Lalie je suis désolé, je suis qu’un con, j’aurais pas dû faire ça. Je m’inquiète tellement pour toi, pour nous, je sais pas ce qui m’a pris. ”


Et tu t’agenouilles à ses côtés, ignorant la brûlure de ta joue et la marque sur ton poignet, le prenant dans tes bras. Le cœur brisé par ses larmes, l’esprit embrouillé par ses mots et ses excuses.
Tu caresses son dos doucement, tu embrasses sa tête.

“— Je suis qu’un con, tu m’as poussé a bout mais j’aurais dû me contrôler, ça arrivera plus Lalie, je. C’était sous l'émotion je suis un abruti et-
— Non c’est rien. C’est ma faute. J’aurais dû t’en parler plus tôt pour pas t’inquiéter. Ça aurait jamais eu lieu si j’avais fait ce qu’il faut, c’est déjà oublié d’accord ? C’est rien. C’est pas grave. ”


Sauf que ça l’est mais tu ne le vois pas. Sauf que ça recommencera même si tu ne le sais pas.
Mais ça ne t’empêche pas de le tenir contre toi, trop inquiète pour lui pour t’en faire pour toi.


Et advienne que pourra.